Septembre 2006. Juliette s'est offert une semaine d'amour avec son nouvel amant, Franz. Pour cette échappée, Franz a choisi Prague où l'on fête l'année Mozart : deux siècles plus tôt, le 29 octobre 1787, y fut créé Don Giovanni. Franz a une passion pour Mozart. Hélas, il suffit d'une nuit praguoise pour que Juliette découvre que ce Franz intelligent et sensible ne veut plus la toucher. Pourquoi être obligé de faire l'amour ? demande-t-il. Ça gâcherait tout entre nous.
Au matin suivant, déboussolée, Juliette sent peser sur elle le regard insistant d'un homme plus tout jeune. Elle en est amusée, n'y reste pas insensible. Le hasard gouvernant parfois les destins, elle retrouve cet admirateur dans l'un des beaux cafés de Prague : il se nomme Angus Farel et, comme tout le monde, il se trouve à Prague en cet automne à cause de Mozart. Antiquaire à sa façon, il possède quelques souvenirs de ce riche mois d'octobre 1787 avec lesquels il compte faire quelques bonnes affaires…
La nuit suivante, Juliette fuit le lit où dort Franz et va frapper à la porte d'Angus. Il l'accueille sans grand étonnement, mais avec gentillesse et attention. Elle se sent en confiance, découvre l'antre étrange de son admirateur. Une sorte d'atelier où règne une grande malle regorgeant de peintures, de lettres manuscrites, de placards et d'ouvrages anciens, tout un fatras qu'Angus appelle son « Almanach ».
Dans les jours qui suivent, une étrange relation se noue entre eux. Elle lui confie son désarroi et sa colère face au comportement de Franz. En réponse, Angus sort des portraits et une longue correspondance de son Almanach. Il raconte les intrigues qui entourèrent Mozart tandis qu'il écrivait difficilement la fin de Don Giovanni. C'était qu'était présent à Prague, ce même automne, celui que toute la bonne société prenait pour le modèle de Don Juan : Giacomo Casanova de Seingalt.
Deux belles femmes, la comtesse Pachta et la baronne de Balt-Farousse, ancienne amante de Casanova, poussent à la rencontre des deux hommes. Une rencontre qui tourne aussitôt au combat.
Hanté par l'inéluctable pouvoir de la mort (il mourra trois ans plus tard), en quête de la puissance mystique de la musique, Mozart considère le libertinage comme le nœud dramatique et érotique qui assemble désir et faute. Don Giovanni sera donc l'expérience de la faute, comme celle de la délivrance spirituelle. Mais à sa manière : avec le rire, la légèreté de la grâce autant que la violence du drame.
Casanova, atteignant alors la soixantaine, en est outré. Pour lui qui quêta sans répit la beauté, en libre individu, sans autre faute que d'assumer la puissance de la séduction, ce Don Giovanni tombe comme une condamnation.
Prise au charme de son conteur, Juliette n'est pas sans douter. Angus livre-t-il la vérité ou suit-il la danse de son imagination ? D'où tient-il les lettres et les portraits de son Almanach ? S'agit-il de reliques véritables ou du fruit de ses talents de faussaire ?
Qu'importe, elle aime l'entendre. Et elle aime le regard qu'il porte sur elle. Elle lui demande de faire son portrait tandis qu'il lui fait écouter Mozart, bien sûr, et lui raconte Casanova. Un érotisme évident enveloppe leurs rencontres, qui apaise et réconforte Juliette. En faisant dans le regard d'Angus l'expérience du Don Giovanni, elle panse la blessure ouverte par son incapable amant. Elle découvre ce qu'au fond elle était venue chercher dans ce voyage en espérant l'amour : sa place et son estime de soi dans le fourmillement chaotique du regard des hommes.
Et c'est peut-être cela le pouvoir de l'art, qui nous fait écouter aujourd'hui encore la musique de Mozart comme si elle pouvait nous apprendre à vivre.